« Une Diva Rouge, Le Coeur En Cendre... »
Histoire librement inspirée du film Black Swan. Les gifs d'illustrations viennent de Tumblr et sont extraites du film.
Si vous n'êtes pas un fan de danse classique, si vous n'étiez pas à New York en cet automne 2014, vous n'avez peut être jamais entendu parlé d'Amy Livingston. En revanche, si vous étiez là, alors vous avez peut être cru comprendre ce qu'il lui était arrivé. Vous avez peut être entendu des rumeurs, des témoignages. Beaucoup de choses ont été racontées à propos d'Amy. Mais moi, je vais vous raconte vraiment son histoire. Je m'appelle Lily et dans une autre vie, celle qui s'est arrêté l'automne dernier, j'étais la meilleure amie de la plus grande danseuse de ballet.
Amy est née à New York. Sa mère était une danseuse elle aussi, mais qui a abandonné sa carrière pour l'élever. C'est elle qui a poussé sa fille vers la danse et qui lui a transmis cette passion viscérale pour cet art. C'est probablement à travers sa fille que la mère d'Amy a vécu la carrière qu'elle avait abandonné.
J'ai rencontré Amy dès nos premières années. Autant dire que je la connais depuis presque toujours car elle a enfilé ses premiers chausson à l'âge de 4 ans. On se retrouvait tous les mercredi pour les cours et plus les années passaient, plus le nombre d'heure de cours a augmenté. Quand on décèle un talent dans ce milieu, on le fait travailler, encore et encore. On faisait parti de ces jeune filles que l'ont prédestine à une grande carrière.
Au lycée, on bénéficiait d'horaires aménagés pour pouvoir répéter, travailler. J'avais beau être une bonne danseuse, Amy avait ce petit truc en plus qui faisait qu'on la remarquait. Même au milieu d'un groupe de 30 danseuses, habillées de la même façon et coiffées toute d'un chignon sans une mèche de cheveux rebelle, c'est elle que l'on remarquait. Elle a rapidement suscité la jalousie mais pas la mienne. Je l'admirais. J'avais envie de lui ressembler, elle était mon inspiration et elle me donnait toujours envie de me surpasser.
Mais avec Jenny qui faisait parti de notre troupe, c'était différent. Amy et elle étaient sans arrêt en compétition pour les premier rôles dans les ballets... Amy se battait contre elle-même pour être la meilleure, à la recherche de la perfection mais Jenny elle, a finit par oublier l'amitié qui nous liait pourtant au départ...
Alors lorsque l'Opéra a décidé de lancer le projet du Lac des Cygnes, tout à basculer. C'était le ballet suprême. Le rôle d'une vie.
Au fur et à mesure des auditions, le chorégraphe en charge a fait une sélection. Il avait éliminé d'entrée celles en qui il ne croyait pas. Il avait ensuite choisit celles qui feraient parti du ballet, mais qui n'auraient pas le niveau pour le rôle principal. Et puis il y a eu les finaliste, celles qui faisaient la différence. Et une fois de plus, Amy et Jenny se sont retrouvées dans les dernières en courses.
Amy rêvait d'avoir ce rôle. Sa mère et elle avaient travaillé toute leur vie pour une opportunité comme celle là. Alors que tout le monde voyait Amy comme quelqu'un d'invincible, le chorégraphe a émit des réserve. Il pensait qu'elle ne tiendrait pas la pression, qu'elle était trop fragile. Alors elle a répondu à sa façon. En travaillant, encore et encore jusqu'à le convaincre de lui faire confiance.
Jenny qui s'était vue gagner pour une fois ne supportait pas l'idée qu'Amy puisse retourner la situation. Comme ses qualités de danseuses ne suffisaient pas, elle a tenté de charmer le chorégraphe. Resté de marbre, ce dernier n'a jamais accrocher et Jenny a décidé de faire craquer Amy. Mais Jenny qui était aussi en lice ne comptait pas renoncer comme ça...
Elle a court-circuité ses répétitions en lui volant ses réservations de salles. Elle a saboté ses tenues... Etc. Et lors d'un filage, elle a piégé Amy pour la mettre en retard et c'est elle qui est entrée en scène pour danser.
ça a été un coup dur pour Amy, elle a eu l'impression d'échouer mais elle n'a jamais voulu s'abaisser au niveau de Jenny. Elle a répondu par le travail et c'est là que j'ai commencé à m'inquiéter pour elle. J'ai vraiment cru qu'elle se tuerait à la tache. C'est comme si petit à petit, à force de répétition, elle disparaissait pour laisser toute la place à son personnage. Elle s'est oubliée pour rentrer dans le personnage. La dualité du cygne blanc et du cygne noir l'ont rendu lunatique et insaisissable.
Et là où je trouvais presque malsain son obsession, le chorégraphe lui y a vu du génie. Sa danseuse était comme il l'avait imaginé, comme il avait rêvé de la façonner pour le rôle. Mais moi je ne la reconnaissais plus. Sa mère aussi a commencé à déchanter. Atteindre leur but, elle en rêvait mais voir sa fille changer autant la désarçonnait. Elle pouvait être douce et devenir sauvage dans la minute qui suivait. Elle semblait ailleurs, plus tellement dans la réalité. C'était comme un acteur qui aurait du mal à sortir d'un rôle prenant après un film. Amy est devenu les deux cygnes sauf qu'entre les répétitions elle ne semblait pas revenir à elle.
Faisant parti de la troupe du ballet, je mettais un point d'honneur a veiller sur elle. Tout était clair, elle serait l'étoile de ce ballet. Là où d'autres concurrente auraient accepté le choix du chorégraphe, Jenny elle n'a pas supporté. Elle a continué de la saboter. Et puisque dans le travail ça ne fonctionnait pas, elle a décidé de saboter la vie privée d'Amy.
Amy avait rencontré Thomas quelques années plus tôt. Ils étaient même fiancés avant le début du projet. Ce type n'avait pourtant rien du prince charmant. Leur quotidien, c'était souvent des disputes. Je le trouvais colérique et il avait tendance à s'emporter facilement. J'avais déjà assisté à des disputes qui étaient déjà violentes verbalement. Je sais qu'un jour c'est devenu physique mais Amy l'a pardonné, elle a inventé une excuse que je n'ai pas avalé mais lui parler à ce sujet avait été impossible. Tête de mûle, amoureuse, je m'en veux encore de ne pas avoir pu l'aider même si je ne suis pas sure qu'elle en ressentait le besoin à l'époque.
Quand Jenny a commencé à tourner autour de Thomas, il n'a pas mis longtemps pour céder a ses charmes. L'ennemie d'Amy a aussitôt utilisé ça contre elle. Sous-entendu, provocation, Amy avait compris ce qu'il se passait. Mais elle n'a pas réagit. Elle a fait passé le ballet avant tout. Elle était dans le déni vis à vis de ce qui s'était passé entre Jenny et Thomas. Elle jouait sa vie et sa carrière avec ce rôle et elle s'est plongée dans le travail.
Elle a tenu le coup jusqu'au soir de la première. Tout le gratin était dans la salle, Amy allait vivre une vraie consécration si le ballet était réussi. Mais je ne doutais pas de son talent. je savais qu'elle serait juste fantastique... Et le spectacle a tenu ses promesses, la première partie annonçait une deuxième partie d'exception... Les critiques étaient unanimes : gracieuse, légère, parfaite.
Pourtant à l'entracte, quand je l'ai vue dans sa loge, elle était nerveuse, perdue et en même temps déterminée. Je crois que je lui ai cassé les pieds en m'inquiétant autant et elle a fini par me demander de la laisser tranquille en mettant son attitude sur le dos du trac. Mais en réalité, et je l'ai su plus tard, au moment même où dans le ballet, le prince tombe amoureux d'une autre, elle a vu Jenny avec Thomas et la réalité lui est revenue en pleine tête. Ce soir là, elle a décidé de quitter Thomas... Le ballet était parfait, elle était sur un nuage et elle allait reprendre sa liberté de façon totale.
Sa douleur a nourri sa prestation, les émotions jouées étaient nourries par la réalité. Sa douleur était réelle quand le public la croyait jouée. Son coeur s'était brisé et le succès et l'atteinte de son but ne suffisait pas à recoller les morceau. Les gens ont pris les larmes dans ses yeux pour de l'émotion, mais moi j'ai vu la tristesse dans les yeux de mon amie. Je n'ai juste pas su l'expliquer sur le coup.
Après le ballet, elle a fait une apparition à la réception mais elle s'est vite éclipsée. Une fois chez elle, elle a prit ses affaires, les a jeté dans sa valise. Elle m'a appelé plusieurs fois, me laissant des message disant qu'elle avait besoin de venir chez moi... Mais je n'ai pas vérifié mon portable avant tard dans la nuit et j'ai quitté la soirée plus tard. Trop tard.
Thomas est rentré plus tôt que prévu. Au même moment, Amy sortait de leur chambre, sacs à la main, prête à partir. Il a compris ce qui se passait. Ils se sont violemment disputés. Il a porté un premier coup. D'autres ont suivi. Elle a cherché à fuir l'appartement mais Thomas a attrapé la batte de base-ball de collection qu'il possédait. Amy s'est écroulée et ce lâche s'est enfuit en la croyant morte.
Amy n'est jamais arrivée chez moi. Inquiète, j'ai essayé de l'appeler et j'ai fini par aller voir chez elle. J'ai trouvé la porte de son appartement entre-ouverte et elle était allongée sur le sol. Je n'ai pas osé la touché de peur de lui faire mal. Elle semblait en état de choc et les larmes coulaient sur ses joues. J'ai appelé les secours et elle n'arrêtait pas de fixer le plafond. Elle a du comprendre tout de suite ce qu'il en était... Je me souviens juste de cette phrase tragique qu'elle a murmuré.
"J'étais parfaite... Au moins une fois..."
Amy a eu la colonne brisée. Depuis, elle ne sent plus ses jambes. Malgré de nombreuses opérations et la gravité de ses blessures, les médecins n'excluent pas la possibilité qu'elle puisse remarcher un jour, mais Amy refuse de s'accrocher... Beaucoup l'ont oublié. Ce milieu est souvent hypocrite et superficiel. Je suis restée à ses côtés. Je l'emmenais au centre de rééducation mais elle acceptait à peine les soins pour ses muscles et refusait de faire les exercices de rééducation.
Elle se laissait trimballer. Elle parlait peu. Elle s'est renfermée et quand elle montre une réaction, c'est souvent de la colère. Son attitude presque d'autiste ont fait que les gens ont commencé à dire qu'elle était devenue folle, qu'elle avait pété les plombs.
Jenny a quitté les Etats-Unis pour l'Europe, ne se pardonnant pas ce qui était arrivé. Thomas a finit par être rattrapé par la justice et il purge actuellement sa peine.
Et un jour, Amy en a eu sa claque. Elle a du en avoir marre de fixer par la fenêtre à attendre je ne sais quoi. New York l'étouffait sans doute, les souvenirs étaient partout. J'ai trouvé une longue lettre sur la table du salon. Elle était partie. Elle a promis d'écrire et elle le fait. Une carte ou une lettre toutes les semaines ou presque. Elle parle d'une île où elle espère redevenir elle même... Elle ne veut pas de mes visites, mais j'espère que là bas elle trouvera ce qu'elle cherche... L'espoir peut être...
(PS: si vous avez lu jusque là... Merci d'être allé au bout!)